Quelle type de carte pour l'intelligence collective ?
Pour permettre le développement de l'intelligence collective par exemple dans la production d'un document collectif ou la résolution des conflits, nous pouvons donc utiliser des cartes afin de montrer les différents cheminements des participants et en découvrir de nouveaux. L'utilisation des schéma heuristiques (
mind mapping) est particulièrement puissant. Lors de réunions en présentiel il est possible de projeter la carte sur un mur à la vue de tous afin de permettre à chacun d'avoir une vue d'ensemble et ainsi de changer totalement la façon dont les participants proposent de nouvelles pistes plutôt que de ne répéter que celles dont ils se souviennent... Généralement la leur.
Mais il existe des limitations à cette approche : la carte heuristique devient vite complexe. Quelqu'un qui arrive en cours de route aura du mal à s'y retrouver. Ceux qui suivent la construction de la carte depuis le début, peuvent l'utiliser de façon plutôt très efficace... jusqu'à ce que le projecteur soit éteint. Le nombre d'idées posées sur la carte dépasse le plus souvent les limites de notre mémoire de travail et dès la fin de la séance nous arrêtons de penser et ne conservons plus que quelques conclusions reflétant mal la richesse de la discussion. Nous avons testé avec succès la superposition d'une carte d'idée sur un territoire suivant la méthode de l'art de la mémoire. La bibliothèque francophone du
metaverse a créé une île virtuelle
20 contenant les différents concepts de notre livre Prospectic
21 sur les sciences et technologies émergentes (Nanotechnologies, Biotechnologies, Sciences de la complexité, Informatique, Neurosciences, Cognition...). Par ailleurs, dans le cadre d'un débat public sur la biologie de synthèse organisé par Vivagora sur 6 séances réparties sur un an, nous avons cartographié en temps réel les idées et opinions sur une ville imaginaire
22.
Cette méthode utilisant des cartes heuristiques couplées à un territoire construit au fur et à mesure s'est révélé particulièrement puissante lors de séances en présentiel ou même lors de réunions en ligne (rencontres synchrones). Pour les échanges en ligne asynchrones, lorsque chacun réagit à la discussion au moment qu'il choisit, il en va différemment. En effet, dans ce cas, le niveau d'attention des participants est très variable depuis les plus proactifs jusqu'aux observateurs épisodiques
23. Il devient difficile de co-construire progressivement une carte en gardant l'attention de chacun. Par ailleurs, il est également difficile de trouver des lieux suffisamment connus de tous pour servir de base pour y placer une ou deux centaines de concepts. Nos maisons et notre environnement sont bien mémorisés dans nos têtes et peuvent servir de support à l'art de la mémoire. Mais ils sont différents pour chacun et ne peuvent être utilisés qu'individuellement. La carte du monde pourrait éventuellement servir de base car nous en avons déjà mémorisé une partie, mais il est délicat de placer des idées souvent subjectives sur des pays ou des territoires habités. Où placer par exemple la notion de déviance ? Le meilleur candidat semble encore la carte du corps humain où une personne même non instruite sait situer des dizaines de lieux différents. Vivian Labrie a expérimenté cette approche avec des "sculptures humaines" constituée de plusieurs participants lors de débats sur la pauvreté au Québec
24. Par ailleurs, lors d'un débat en ligne, les participants qui adoptent une attitude réactive, environ dix fois plus nombreux que les proactifs, reçoivent les contributions et les synthèses dans un outil qu'ils lisent régulièrement plutôt orienté texte (
mail, Facebook, Twitter)
25 et ne vont bien souvent pas faire l'effort d'aller chercher sur une page particulière la carte heuristique présentée sous forme graphique. Demander de cliquer sur un lien dans un texte envoyé, réduira à environ la moitié le nombre de personnes qui pourront réagir.
Pour les débats en ligne, il est donc plus intéressant d'avoir une carte constituée exclusivement de texte (même si dans le cas de Twitter, il est toujours nécessaire de cliquer sur un lien si on veut proposer plus de 144 caractères). Le texte, lorsqu'il est formaté, propose effectivement ce type de possibilité avec les listes à point structurée (qui constituent une arborescence comme les schémas heuristiques) et différents artifices qui permettent de naviguer sur le texte comme sur une carte, sans avoir besoin de lire le texte du début à la fin (gras, soulignés...). Si on conserve la "carte heuristique textuelle" courte, de la taille d'un écran moyen d'ordinateur, alors on peut permettre aux participants d'avoir une vision d'ensemble des échanges et d'utiliser la pensée 2 pour produire de l'intelligence collective.
- 1 Ces idĂ©es ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©es Ă l'origine dans Cornu Jean-Michel, « Modes de pensĂ©e et conflit d’intĂ©rĂŞt » [en ligne], in Nouvelles technologies, nouvelles pensées ?, Innovation, ISSN 1961-8328, 1 vol., Limoges, France, FYP Ă©ditions, 2008, disponible sur <http://www.cornu.eu.org/files//ProspecTIC_pensee2.pdf>.
- Disponible dans l'article : « Nous avons non pas un mais deux modes de pensée » [en ligne], Le blog de Jean-Michel Cornu, disponible sur <http://www.cornu.eu.org/news/nous-avons-non-pas-un-mais-deux-modes-de-pensee>, (consulté le 4 février 2014).
- 2 La démarche rationnelle consiste à émettre une hypothèse et ensuite à chercher à la réfuter. En effet, depuis Aristote, nous savons qu'il n'est pas possible de démontrer qu'une théorie générale - Aristote parle de "proposition universelle"- est vraie (une phrase du type tous les lapins ont une queue ne peut pas être vérifiée totalement car on est jamais sûr d'avoir pu observer tous les lapins...). La démarche rationnelle consiste donc à chercher à démonter que la théorie est fausse. Si on n'y arrive pas alors la théorie est considérée suffisamment bonne pour être considérée comme vraie provisoirement... jusqu'à ce qu'une réfutation l'invalide (voir la théorie vérificationniste de la signification de Karl Popper). La démarche scientifique s'appuie sur la démarche rationnelle mais en tentant de tirer des prévisions vérifiables de la théorie, qui permettent de la réfuter... ou non.
- 3 « Antagonisme » [en ligne], Wikipédia, disponible sur <http://fr.wikipedia.org/wiki/Antagonisme>, (consulté le 4 février 2014).
- 4 Voir "Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes" - la parabole des aveugles et de l'éléphant
- 5 Pour en savoir plus, voir le carré sémiotique ("square of opposition" en anglais) : « Le carré Sémiotique » [en ligne], Le blog de Jean-Michel Cornu, disponible sur <http://www.cornu.eu.org/news/le-carre-semiotique>, (consulté le 4 février 2014).
- 6 Voir "Le choix a posteriori"
- 7 Cela est dû au fait que nous utilisons un langage oral ou écrit mais qui se déroule de façon séquentielle. D'autres formes de langage pourraient permettre de montrer simultanément deux ou plusieurs notions. C'est le cas par exemple de la danse. Les abeilles utilisent cette forme de langage (sans cependant avoir un langage symbolique élaboré comme le nôtre). De même la langue des signes pour les sourds et malentendants, permet certaines choses qui sont impossible avec le langage oral, par exemple dire avec la main gauche une chose et autre chose, même opposée avec la main droite !
- 8 Monod Jacques, Le hasard et la nécessité: essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne, Points. SĂ©rie Essais, ISSN 1264-5524 43, 1 vol., Paris, France, Éd. du Seuil, 1970.
- 9 Baddeley Alan D., Hitch G.J., « Working memory », in G. H. Bower (Ă©d.), The psychology of learning and motivation : Advances in research and theory Volume 8, vol. 8, New York, Academic Press, 1974, p. 47‑90.
- 10 Bono Edward De, Conflits: comment les résoudre, trad. Terrier Anne, 1 vol., Paris, France, Eyrolles, 2007.
- 11 Braddeley, A. D., Hitch, G. J. et Bower, G. ibid.
- 12 Appelée "mémoire sémantique"
- 13 Miller George A., « The magical number seven, plus or minus two: some limits on our capacity for processing information. », Psychological review 63 (1956/2), p. 81.
- 14 Extrait de Jean-Michel Cornu, Nouvelles technologies, nouvelles pensées ?, ibid.
- 15 Yates Frances Amelia, L’art de la mémoire, trad. Arasse Daniel, Bibliothèque des histoires, ISSN 0768-0724, 1 vol., Paris, France, Gallimard, impr. 1987, 1987.
- 16 CicĂ©ron, De l’orateur, trad. Courbaud Edmond Éditeur scientifique, Collection des universitĂ©s de France, ISSN 0184-7155, 1 vol., Paris, France, Les Belles Lettres, 1966.
- 17 Carruthers Mary J., Machina memorialis: méditation, rhétorique et fabrication des images au Moyen Age, trad. Durand-bogaert Fabienne, Bibliothèque des histoires, ISSN 0768-0724, 1 vol., Paris, France, Gallimard, 2002.
- 18 Carruthers, Mary J. ibid.
- 19 « Des cartes pour décrire des contes : rencontre avec Vivian Labrie » [en ligne], Le blog de Jean-Michel Cornu, disponible sur <http://www.cornu.eu.org/news/des-cartes-pour-decrire-des-contes>, (consulté le 4 février 2014).
- 20 « Ile Prospectic » [en ligne], ProspecTIC?, disponible sur <http://prospectic.fing.org/texts/ile-prospectic>, (consulté le 4 février 2014).
- 21 Cornu Jean-Michel, Nouvelles technologies, nouvelles pensées ?, Innovation (Limoges), ISSN 1961-8328, 1 vol., Limoges, France, FYP Ă©ditions, 2008.
- 22 « Biosynth-ville : la ville de la biologie synthétique » [en ligne], Vivagora, disponible sur <http://web.archive.org/web/20130619184123/http://www.vivagora.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=436:biosynth-ville-la-ville-d-ela-biologie-synthetique&catid=21:nos-actions&Itemid=111>, (consulté le 4 février 2014).
- 23 Voir "La taille des groupes et les rĂ´les des membres"
- 24 « Collectif pour un Québec sans pauvreté » [en ligne], disponible sur <http://www.pauvrete.qc.ca/>, (consulté le 4 février 2014).
- 25 Voir "La taille des groupes et les rĂ´les des membres"
En résumé
Dans un échange à plusieurs, et plus encore dans un conflit, chacun à tendance à défendre sa position et à la répéter sans cesse pour être sûr qu'elle soit bien prise en compte. Dans les faits, très souvent les différents points de vue ne s'excluent pas mais au contraire se complètent pour donner ensemble une vision plus globale. Pour dépasser cette difficulté, il faut prendre en compte nos deux modes de pensée qui utilisent chacun une mémoire de travail différente.
Le premier, basé sur le discoursconsiste à placer les idées les unes à la suite de l'autre, un peu comme nous plaçons un pas devant l'autre pour avancer depuis un point de départ jusqu'à un point d'arrivée en suivant un cheminement. Ce mode de pensée permet en particulier l'approche rationnelle mais il prend très difficilement en compte le conflit (un point de départ, deux directions), l'intelligence collective (plusieurs points de vue sur le même point d'arrivée) ou encore la créativité (trouver de nouveaux chemins entre plusieurs points de départ et plusieurs points d'arrivée) qui utilisent tous les trois un autre mode complémentaire.
Le deuxième mode de pensée est basée sur la cartographie. Il consiste à disposer toutes les idées en fonction de leur proximité sur une même carte mentale, sans chercher à les sélectionner a priori pour obtenir une vision la plus complète des idées et des chemins possibles. Les schémas heuristiques (mind mapping en anglais) co-construits et projetés à la vue de tous lors de séances sont très performants pour donner une vision globale aux membres du groupe et ainsi permettre de chercher de nouvelles idées et de nouveaux points de vue plutôt que chacun ne se focalise que sur une ou quelques idées déjà proposées.
Pour aller plus loin, deux approches sont possibles :
- L'art de la mémoire : Lors de rencontres synchrones (en ligne ou en présentiel), il est possible de coupler la carte d'idée avec une autre carte souvent territoriale que chacun peut conserver plus facilement dans sa mémoire à long terme. Il peut s'agir d'un lieu connu de tous (leur cathédrale pour les moines du Moyen Âge) ou à défaut d'un lieu co-construit (il est plus facile de mémoriser à long terme un territoire que des idées) ;
- Les cartes textuelles : dans les échanges asynchrones en ligne, les personnes qui adoptent une attitude réactive (dix fois plus nombreux que les proactifs) et les "observateurs" (encore plus nombreux) utilisent des outils qui gèrent mal le mode graphique (mail, Facebook, Twitter). Proposer une carte dessinée nécessite alors de fournir un lien vers une page web qui contient la carte. Mais dans ce cas, une moitié seulement environ des participants vont voir la carte. Il est cependant possible d'utiliser les possibilités de présentation des textes pour permettre une carte textuelle qui ne nécessite pas d'être lue en entier comme un texte mais peut être parcourue comme une carte : listes à points et à sous-points, formulation courte des idées tenant sur maximum une ligne, gras, soulignés, italique pour mettre en valeur certains mots clés.
Mot clé : #cartographier
CrĂ©dits photographiques : By วาดโดยบุญศิริ เทพภูธร สพอ. นครหลวง จ.พระนครศรีอยุธยา [Public domain], via Wikimedia Commons
Ce que nous avons appris de Cooptic
Les formations hybrides, liant les "enseignements" en présence et à distance, sont d'excellents outils de développement professionnel tout au long de la vie.
Cependant, plusieurs conditions sont nécessaires pour que ce type de dispositifs de formation devienne un réel écosystème d'apprentissage.
L'expérience de Cooptic a renforcé nos convictions sur quelques conditions de réussite des formations à l'ère numérique.
La formation n'est plus une transmission pyramidale des savoirs, où celui qui sait passe l'information à celui qui apprend. C'est une co-construction des connaissances à partir de la mise en réseaux des informations disponibles, sélectionnées par le formateurs, des connaissances et des expériences individuelles enrichies collectivement par les échanges réflexifs. Le processus formatif est explicité par le formateur pour que la formation permette d'apprendre à apprendre.
La personne est au centre de l'apprentissage. Mais cette personne est facilement connectée au monde et aux autres, grâce à des nouvelles technologies disponibles.
Dans la formation Cooptic et Animacoop, son équivalent français, nous expérimentons la construction des communautés apprenantes dont le fonctionnement est proche des communautés épistémiques (cf.
supra). Les stagiaires publient des articles, créent des parcours de formation en devenant progressivement des "amateurs -experts" actifs. Cette nouvelle qualité des personnes en formation conjugue d'authentiques ambitions intellectuelles, pédagogiques, voire démocratiques, et ouvre largement la place au plaisir d'apprendre.
Le travail de formateur change car il assure plusieurs fonctions en parallèle :
- Formateur "expert" : il est le référent sur les sujets traités, il transfert les connaissances.
- Accompagnateur : il structure et accompagne la progression du groupe dans un environnement d'apprentissage fondé sur la communication et l'échange.
- Tuteur : il établit un lien individualisé avec chaque apprenant en aidant à surmonter l'effet d'isolement que les formations à distance induit.
- "Technicien" : il est garant du fonctionnement des dispositifs techniques.
Ces nouvelles "fonctions" assurées par un ou plusieurs formateurs nécessitent des changement profonds :
- Reconsidérer la "distance" comme un espace-temps de possibles interactions et apprentissages. On peut apprendre, créer des liens, travailler ensemble, produire une ressource dans des configurations multiples :
- À distance asynchrone en contribuant selon ses disponibilité sur un espace d'écriture, en partageant des ressources... En échangeant par mail ou forum,
- À distance synchrones durant des conférences vidéo, ou échanges de pratique entre les groupes,
- En présence et à distance à la fois... Il est possible d'organiser des cours en visio-conférence avec deux groupes en parallèle sur deux sites différents.
- Rendre la relation plus horizontale entre les formateurs, les stagiaires et le savoir. Dans les flux des informations et des échanges, le formateur est un élément parmi d'autres.
- Adopter la méthode "surf "1 ....accepter les incertitudes et oser expérimenter durant le processus. Le formateur est garant de la méthodologie : il crée des conditions d'équilibre et ne maîtrise pas nécessairement la forme des résultats de coproduction.
Les éléments d'innovation et ses effets sur le dispositif de formation et l'apprentissage de la coopération
Ce que Cooptic innove |
L'effet sur la formation |
L'effet sur l'apprentissage de la coopération. |
Le choix d'un wiki comme plate-forme de formation |
Dispositif technique très facile d'utilisation avec une ergonomie intuitive, un graphisme soigné. Le formateur veille à diminuer les éventuelles contraintes techniques. |
Diminue la contrainte de participation. Met en confiance face aux outils. Crée le sentiment de plaisir. Incite à publier sur le Net. |
Un espace collectif et des espaces individuels |
La plate-forme wiki/ permet de créer des espaces personnels liés facilement aux supports collectifs. |
L'appartenance au groupe apprenant est naturelle (espaces communs). L'apprentissage individualisé est possible (espace personnel). |
Contenus ouverts |
Les cours sont mis en ligne et accessibles Ă tous et au-delĂ de la formation. |
Liberté de revenir sur les cours à tout moment. Plus de disponibilité pour les activités et les échanges. |
Contenus d'apprentissage plus larges que les cours |
La mise en ligne des cours "libère" du temps pour l'accompagnement dans l'acquisition des compétences. |
Acquisition des savoirs-faire : "apprendre Ă apprendre" et "apprendre Ă faire avec les autres". |
Structure modulaire |
Des contenus sont divisés en unités (granularisation). Le parcours global est prédéfini, mais il peut être modifié pendant la formation. |
La construction d'un parcours plus personnel est possible. |
Approche systémique |
Les contenus sont choisis pour correspondre à l'ensemble de l'activité, du réseau collaboratif et aux différents niveaux (individu, groupe, environnement). |
Acquisition de grilles de lecture globale. Étude relativement complète des processus collaboratifs. |
Pluralité des parcours structurés |
Parcours modulaires des cours (vie d'un réseau). Parcours activité de groupes (communauté apprenante). Parcours "projet professionnel" (environnement collaboratif). |
Multiples occasions de traiter les questions de coopération et de collaboration ; les pratiquer, les animer. Analyse du process collaboratif. |
Changement progressif des tailles des groupes de travail |
Les activités sont programmées sur la logique de progression : exercice individuel, en binôme, en groupe de 4-8 |
Pratique des communautés épistémiques. L'exercice de groupes éphémères (changement d'échelle). |
Mise en réseaux et échange des pratiques |
L'activité est pensée comme un agrégateur de savoir. Le formateur est garant de la méthodologie. |
Valorisation de ses expériences comme une source de connaissance (praticien réflexif). Forme particulière de professionnalisation (à partir des expériences des autres). Renforcement de l'estime de soi. |
Coproduction des contenus |
Une plate-forme évolutive : l'ajout de pages, de rubriques est possible par tous. Le formateur accompagne le processus, il est garant de sa cohérence. |
Posture active face au savoir. Sentiment de créer un "bien commun". |
Notion de "présence" à distance |
Une articulation affinée des temps présence-distance. L'effort d'accompagnement est mis sur les interactions entre les participants. L'accompagnement "à distance" est systématisé (points fixes avec le formateur). |
L'effet de distance est diminué voir transformé. Se dégagent les méthodes de proximité de projets, de cultures. |
Pour en savoir plus : les communautés épistémiques
Les communautés épistémiques peuvent être définies comme un [petit] groupe de représentants partageant un objectif cognitif commun de création de connaissance et une structure commune permettant une compréhension partagée. C'est un groupe hétérogène. Par conséquent, l'une des premières tâches de ses membres consiste à créer un codebook, une sorte de "code de conduite", qui définit les objectifs de la communauté et les moyens de les atteindre ainsi que les règles de comportements collectifs. Donc ce qui caractérise une communauté épistémique est avant tout l'autorité procédurale, qui est garante du progrès vers le but fixé tout en laissant aux participants une certaine autonomie.
La production de la connaissance s'est réalise à partir des synergies des particularités individuelles. Cela nécessite que la connaissance qui circule au sein de la communauté soit explicitée. Cette explicitation se fait par la conversion de connaissances tacites individuelles en connaissances explicites et collectives : les membres de la communauté épistémique sont unis par leurs responsabilités à mettre en valeur un ensemble particulier de connaissances. L'objet de l'évaluation concerne donc la contribution individuelle à l'effort vers le but collectif à atteindre, et la validation de l'activité cognitive (production de la connaissance) de chaque membre se fait par les pairs selon les critères fixés par l'autorité procédurale. Il en est de même avec le recrutement de nouveaux membres dans ce type de groupes : il se fait par des pairs, selon des règles préétablies relatives au potentiel d'un membre à réaliser le but de la communauté.
Bibliographie
Cohendet, P., Créplet, F. et Dupouët, O., (2003), Innovation organisationnelle, communautés de pratique et communautés épistémiques : le cas de Linux. Revue française de gestion, n° 146, 99-121.
- 1 Rosnay, Joël. Surfer la vie : vers la société fluide. Paris : Les liens qui libèrent, 2012